Le monument aux morts de Firminy au coeur des polémiques
Edifié en 1926, le monument aux morts de Firminy a été réalisé par A. Gorce, architecte appelou et par les sculpteurs locaux Estieux et Preynat.
Ce monument est constitué d’un hémicycle en calcaire sur lequel sont inscrits les noms des 606 appelous morts pour la France durant la Grande Guerre. Il repose sur un socle de granit poli qui comporte le nom des champs de bataille où les poilus sont morts. La statue, réalisée par le sculpteur Jean Rabiant et dominant l’ensemble, représente la victoire couronnant les héros.
Ce n’est que le 11 novembre 1928, 10ème anniversaire de l’armistice, qu’est inauguré le monument en présence d’une foule nombreuse et des différentes sociétés de la ville (société de gymnastique indépendante de Firminy, Anciens Militaires de Firminy, les Mutilés de Firminy, la Société polonaise de Firminy ...).
La journée commence par une messe en mémoire des poilus en l’Eglise Saint Firmin ainsi que par une cérémonie religieuse au temple. Elle se prolonge par un cortège de la place du Breuil jusqu’à la place Vincent-Brunon (l’actuelle place du 8 mai 1945) où se trouve le monument. Le journal Le Poilu de la Loire estime à 5000 le nombre de personnes assistant à l’inauguration. Plusieurs personnalités prononcent un discours. Parmi elles, M. Monteiller, vice-président du comité à l’origine du monument, M. Beynet, représentant de la Fédération des poilus de la Loire, M. Jean Taurines, député et M. Heumann, secrétaire général de la préfecture.
cartes postales des années 30
Document 1. L’inauguration du monument aux morts de Firminy vue par La Tribune Républicaine
En prévision d’incidents possibles, des forces de police assez importantes sont arrivées dans la matinée. Elle se composent de gendarmes à pied et cheval.
A 10 heures, au moment de la formation du cortège, les abords de la place du Breuil sont noirs de monde. La circulation est impossible.
Le parti communiste avait affiché dans la nuit des affiches qui ont été aussitôt lacérées. Dans la rue des militants communistes distribuent des tracts intitulés : la guerre menace ! Néanmoins aucun n’incident ne viendra troubler la journée (…).
Le défilé se met en marche aux accents de pas redoublés entraînants, joués par l’union musicale et l’avenir musical (…).
Devant le monument, une estrade a été dressée. Le cénotaphe est entouré de mats où flottent des drapeaux (…). Les fleurs à profusion sont déposées sur la mosaïque du monument.
Un délégué invite les assistants à observer une minute de silence qui est annoncée par une sonnerie de clairon.
M. Monteiller, au nom du comité d’érection ; adresse aux 606 enfants de Firminy morts à la guerre, un souvenir ému (…). Après avoir exprimé l’espoir que le sacrifice des enfants de Firminy sera pour la jeunesse un enseignement, il place le monument symbolique sous la sauvegarde de la population.
La Tribune Républicaine, le 12novembre 1928.
Document 2. Discours de Mr. Beynet, Fédération des poilus de la Loire
Notre reconnaissance et nos remerciements vont d’abord à la population de cette cité de travailleurs, dont les souscriptions généreuses ont permis l’érection de ce monument si expressif et si touchant.
Cette modeste ouvrière de France, qui incarne ici la Victoire et qui me semble, en un geste d’apaisement pacifique, bénir les tombeaux de nos morts, est une image parfaite de ce qu’est le cœur ouvrier dans nos régions laborieuses, où l’habitude des dangers permanents ayant forgé à chacun une âme virile, on sait mesurer la grandeur du sacrifice, on sait se souvenir.
Je le dis bien haut, nous sommes profondément émus et touchés de ce solennel hommage rendu aujourd’hui par le peuple appelou à ceux de ses enfants qui ont fait généreusement - eux aussi - le glorieux sacrifice de leur vie pour la défense du sol natal, la défense de nos libertés et la sauvegarde de l’humanité.
Le Mémorial de la Loire et de la Haute Loire, le 12 novembre 1928
Document 3. Extrait du discours du vice-président du comité à l’origine du monument, M. Monteiller prononcé le 11 novembre 1928 :
Ce monument placé sous les regards de tous sera dans notre pensée comme le symbole de la sépulture unique de nos morts, symbole du testament moral qu’ils nous ont laissé, symbole des vertus qui régnaient dans notre vie commune au front : tolérance, égalité absolue, fraternité parfaite.
Le Poilu de la Loire (décembre 1928)
Document 4. Extrait du discours du député Jean Taurines prononcé le 11 novembre 1928 :
Se souvenir ce n’est pas attiser le foyer de la revanche, mais c’est connaître tout le prix d’un sacrifice et rendre à ceux qui l’on consenti, à ceux qui sont morts pour que leur Patrie puisse vivre, l’hommage de notre vénération et de notre éternelle reconnaissance.
Le Mémorial de la Loire et de la Haute Loire, le 12 novembre 1928
Sources :
Monique LUIRARD, La France et ses morts ; les monuments commémoratifs dans la Loire, Ed : l’Eveil de la haute Loire 1977.
Le Mémorial de la Loire et de la Haute Loire, 12 novembre 1928
Le Poilu de la Loire, 10décembre 1928
La Tribune Républicaine, 12 novembre 1928
L.BRUN, lycée Jacob Holtzer (Firminy), mars 2006
clichés personnels (mars 2006)