Les frontières d’un État adhérent : le cas de la Hongrie
En quoi le découpage et le contrôle des frontières de la Hongrie
alimentent plusieurs débats en Hongrie et en Europe ?
1. Dites quand ont été définies les frontières de la Hongrie et selon quel critère. Quelle différence faites-vous avec la Pologne quant à l’évolution du tracé de ses frontières (documents 1 et 2 p. 198 et document 1 ci-dessous).
2. Indiquez, quelle place occupe le traité du Trianon (1923) à l’origine du découpage des frontières de la Hongrie dans le discours des dirigeants hongrois et dans l’imaginaire collectif hongrois (document 1 ci-dessous).
3. Montrez qu’au cours du XXième siècle, la Hongrie a toujours occupé une position stratégique en Europe (documents 2 à 4 p. 198-199)
4. Présentez les décisions prises par Victor Orban à propos de ses frontières et les conséquences sur les circulations des personnes (documents 3 et 4 p. 199 et document 2)
5. Dites si la politique migratoire prônée par Victor Orban, vous paraît conciliable avec les valeurs démocratiques européennes (biographie p. 198, document 4 p. 199, document 4 p. 195 et document 2)
6. A partir du travail réalisé, vous rédigerez une réponse structurée permettant d’apporter une réponse à la problématique de départ : En quoi le découpage et le contrôle des frontières de la Hongrie alimentent plusieurs débats en Hongrie et en Europe ?
Document 1. En Hongrie, le traité de Trianon occupe toujours les esprits
Trianon (1), Viktor Orban en parle souvent dans ses discours. Comme le 15 mars, à Budapest. Ce jour-là, à l’occasion du 170e anniversaire de la guerre d’indépendance hongroise de 1848-1849, le premier ministre souverainiste se lance même dans un parallèle entre le traité, signé dans l’après-midi du 4 juin 1920 dans la galerie des Cotelle au Grand Trianon de Versailles, et la « crise » des migrants. « La situation, énonce-t-il devant la foule, est que l’on veut nous prendre notre pays. Pas d’un trait de plume, comme il y a cent ans à Trianon. Ce que l’on veut maintenant, c’est que nous le remettions à d’autres, à des étrangers qui ne respectent ni notre culture, ni nos lois, ni notre mode de vie. »
En agitant pareille théorie du complot, Viktor Orban confirmerait, selon l’historienne Catherine Horel, directrice de recherche au CNRS, une spécificité hongroise. « Car si l’angoisse de la disparition est un trait commun à tous les pays d’Europe centrale et orientale, qui se posent en victimes des appétits des puissants, il n’y a qu’à Budapest que les traités de paix reviennent sans cesse dans le langage courant. »
(…) Les recherches de Mme Horel (…) prouvent qu’au-delà de la nostalgie d’une poignée de fanatiques réclamant la reconstitution de la « grande Hongrie » dans les rangs de l’extrême droite du parti Jobbik, un traumatisme réel est ancré dans la conscience historique des Hongrois.
« La société civile a immédiatement dénoncé une injustice flagrante en 1920, la réception du traité ayant été qualifiée de “diktat” par la presse », rappelle la chercheuse, qui s’est penchée sur l’histoire des « vaincus » dans un ouvrage collectif paru en 2016 aux éditions Nouveau Monde. « Le nom de Georges Clemenceau est connu des Hongrois. Il est perçu comme l’ennemi juré de leur nation et le principal responsable de la sévérité du traité. La période communiste a mis une chappe de plomb sur ce ressentiment. Mais ce dernier est revenu comme un boomerang après 1989. » La lecture historique qui est faite aujourd’hui, par des historiens et des journalistes proches du régime, mais aussi par le Musée national, relève d’une mystification. Toute distance scientifique est bannie. Et le but manifeste semble de maintenir bien ouverte la blessure.
Rarement sont en effet évoquées les faiblesses inhérentes à la couronne austro-hongroise, au sein de laquelle les Hongrois, grâce à l’appui des Autrichiens, dominaient d’autres peuples, dans un contexte de crise sociale, entre 1905 et 1914. La classe politique hongroise a, par exemple, toujours refusé d’instaurer le suffrage universel. Or, en 1925, le sociologue Oszkar Jaszi estimait déjà que seule une démocratisation de la monarchie aurait pu éviter un démembrement du royaume de Hongrie.
Blaise Gauquelin, Le Monde, 01 novembre 2018
1. Trianon – paraphé par la délégation hongroise, puis ratifié par le Parlement hongrois et par le régent de Hongrie – a consacré le dépeçage de la Hongrie, qui a perdu 70 % de son territoire et 3 millions de ses habitants.
Document 2. Face aux migrants, la Hongrie ferme sa frontière (France Info – 13 septembre 2015)