La périodisation
« L'histoire est la connaissance du passé humain »
Henri-Irénée Marrou, De la connaissance historique, Paris, Seuil, 1954, pp. 32-33
Comment découper le temps en tranches ?
Exercice 1. Découper le temps : une préoccupation récente
1. Définissez ce qu’est la périodisation et dites quel est son intérêt (manuel p. 24)
2. Indiquez qui furent les premiers à diviser l’histoire en trois périodes et précisiez quels découpages ils ont retenus (manuel p. 24 et document 1). Complétez le document 2 pour illustrer votre réponse.
Document 1. La vision chrétienne des origines
Aucun des mythes fondateurs ne nous renseigne sur l’âge précis de l’Univers. L’idée même de chiffrer l’histoire du monde semble étrangère aux anciennes mentalités (…).
Dans leur très grande majorité, les analystes du récit biblique situent la date de la Création, en chiffres ronds, à 4 000 ans avant l’ère chrétienne. Le raisonnement le plus couramment suivi consiste à compter le nombre des générations qui se sont succédé depuis Adam jusqu’à Jésus. Luc l’Évangéliste et d’autres exégètes à sa suite en dénombrent soixante-quinze, ce qui, à raison d’environ un demi-siècle par génération, permet bien d’avancer le chiffre de 4 000 ans. Ces évaluations seront admises jusqu’au XVIIIe siècle.
La date de la création, exposition de la Bibliothèque Nationale de France « Ciel et Terre »,
Exercice 2. La périodisation en France aujourd’hui
1. A l’aide du document 3 et de l’exercice précédent, dites quelles périodes ont été successivement retenues pour faire débuter l’histoire ; vous expliquerez pourquoi la préhistoire pose problème.
2. Identifiez, datez et présentez les 4 grandes périodes qui sont traditionnellement utilisées pour découper l’histoire (manuel p. 24 à 26) ; répondez en reproduisant et complétant le tableau ci-dessous.
Période |
Dates et significations |
Caractéristiques principales de la période |
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3. Montrez en choisissant un exemple de date-clé que le choix de celle-ci peut susciter des débats (manuel p. 24 à 26).
Document 3. Quand commence l’histoire ?
Jusqu’au XIXe siècle, les auteurs d’ouvrages historiques et les rédacteurs de programmes et de manuels scolaires prennent comme point de départ de l’histoire la création divine de l’humanité. En France, cela perdure jusqu’au Second Empire dans l’enseignement public : le programme de sixième de 1852 commence par l’étude de la « Création », celui de 1857 par celle de la « Genèse » et c’est seulement en 1865 qu’il débute par l’« Histoire primitive du monde ». L’« Histoire sainte » est désormais enseignée en classes élémentaires puis disparaît à son tour en 1880. Cette époque, où est levée la confusion entre histoire sainte et histoire tout court, est aussi celle où se développent les recherches sur les périodes les plus anciennes de l’humanité.
Cette « préhistoire » (le mot est employé à partir de 1864) est, d’emblée, considérée par les historiens comme extérieure à leur discipline. Le motif de cette exclusion est l’absence, pour cette période, de traces écrites.
(…). Cet ostracisme dure encore au milieu du XXe siècle. En témoignent les premières pages des manuels de sixième de l’enseignement secondaire : « Sans documents écrits il n’y a pas d’histoire possible », écrivent en choeur les auteurs des manuels Hachette de 1958 et Nathan de 1959. (…).
La préhistoire a sa propre périodisation, jalonnée par les phases successives du processus d’«hominisation (…). Les débats restent vifs du fait de la rareté des traces, de l’incertitude des instruments de datation, des différences d’approche entre disciplines et des divergences d’interprétation. En l’état actuel des connaissances, la position dominante est que les débuts de la préhistoire se situent en Afrique orientale, il y a plus ou moins trois millions d’années, et que la Mésopotamie et l’Égypte, en se dotant d’une écriture (mais il y a aussi débat sur ce qu’est une écriture) dans la seconde moitié du III e millénaire avant J.-C., sont les premières à « entrer dans l’histoire ».
Jean Leduc , La construction historique des cadres de la périodisation ,
ATALA Cultures et sciences humaines n° 17, «Découper le temps - Actualité de la périodisation en histoire», 2014
Exercice 3. Un découpage contesté : l’exemple du Moyen-Age
1. Indiquez quel découpage l’historien Jacques Le Goff propose pour le Moyen-Age (document 4)
2. Relevez les différents arguments développés par l’historien Jacques Le Goff lui permettant d’affirmer que le Moyen-Age se prolonge bien au-delà du XV° siècle (document 4).
Document 4. Un long Moyen-Age ?
Dans son dernier essai, Faut-il découper l’histoire en tranche (Le Seuil, 2014), Jacques Le Goff (…) s’interrogeait sur la périodisation en histoire. (…).
De l’époque médiévale, déjà bien longue (plus de mille ans), Le Goff propose de faire une période plus longue encore, en renonçant du même coup à présenter les XVIe-XVIIIe siècles comme une période à part. (…).
À son apparition, l’idée de Renaissance va de pair avec la dévalorisation du Moyen Âge, qui ne serait qu’un âge intermédiaire (c’est le sens de l’adjectif « moyen ») entre l’Antiquité et sa redécouverte par les humanistes. Pourtant, le Moyen Âge connaît l’Antiquité, et il est même plein d’elle, de ses valeurs, de ses modèles, de sa littérature : ainsi les « arts libéraux », base du savoir médiéval, sont-ils d’origine antique, comme l’est la langue-reine du Moyen Âge, le latin (« le Moyen Âge est une période beaucoup plus « latine » que la Renaissance ». (…)
Le Moyen Âge fut capable d’innovation et d’inventivité. Pour toutes ces raisons, l’auteur soutient de façon convaincante qu’il ne peut guère être séparé de la Renaissance. D’autant que celle-ci et l’époque moderne tout entière sont a contrario emplies de Moyen Âge. La meilleure illustration en est la grande « chasse aux sorcières », phénomène renaissant ou « moderne » bien plus que médiéval (…).
Plus que de rupture, il est donc pertinent de parler d’une « plus ou moins longue », « plus ou moins profonde mutation ». Entre le XVIe siècle et le milieu du XVIIIe, il n’y aurait en fait pas de changements de nature à faire basculer dans une autre période : on reste dans « une économie rurale de longue durée » (…).
Bref, il faut attendre la révolution industrielle et la Révolution française pour qu’on puisse parler de changement de période. (…).
La thèse du long Moyen Âge est bien sûr discutable (…). On peut donc défendre, contre ce livre, qu’au XVIe siècle la féodalité recule sensiblement face aux États, que le christianisme est fissuré par la Réforme, que l’Occident commence à délaisser la Méditerranée pour se tourner vers l’Atlantique, etc., et que, pour toutes ces raisons, le « Moyen Âge » cesse. (…).
D’après Pierre Savy , L’histoire à la découpe, article publié sur le site lavidedesidéees.fr le 2 avril 2014
Conclusion. Montrez que les historiens peuvent proposer d’autres découpages du temps (manuel p. 27).
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