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Lancé en 2006, ce blog pédagogique d'histoire-géographie et d'éducation morale et civique (E.M.C.) tire son nom d'un terme issu du parler gaga (le parler stéphanois) ; le cafuron (window in english !) est une lucarne ou un oeil de boeuf éclairant un réduit. Ce blog s'adresse tout autant aux élèves du lycée Jacob Holtzer (Firminy- Loire) qu'à un public plus large. Bonne visite !

12 Sep

la naissance des établissements Holtzer

Publié par Louis BRUN  - Catégories :  #Patrimoine local

article réédité, première publication le 18 octobre 2006
 
 
Une entreprise révélatrice du processus d'industrisalisation : les établissements Holtzer à Unieux
 
 

En quoi le développement des établissements Holtzer est-il révélateur du processus d’industrialisation ?

  

  

 
Document 1. La naissance d’un géant industriel
 
Ouvrier alsacien aux dons précoces, Jean Jacques (Jacob en Alsacien) (1788 – 1862) quitta sa région natale pour rejoindre son cousin Jean Holtzer qui travaillait à la Manufacture d'armes de guerre de Saint-Étienne. Ils décidèrent de fonder ensemble une fabrique d’acier corroyé (1) dans la vallée du Cotatay. Leurs produits étaient destinés à la coutellerie, à la taillanderie (2) et à l’armurerie. L’afflux des commandes les obligea à chercher un autre site. Jacob se fixa à Unieux en 1829 et acheta le moulin du Vigneron pour installer des martinets (3). En 1842, la collaboration entre les deux cousins cessa.
C’est à Unieux que l’établissement de Jacob Holtzer technicien inventif, toujours en quête de nouvelles connaissances et de nouveaux procédés, allait participer à l’essor industriel de la vallée. Jacob fabriqua tout d’abord un acier corroyé mais cette technique du corroyage restait à ses yeux empirique et incertaine pour des utilisations exigeantes comme celles des aciers à outils. Conscient que des méthodes plus scientifiques permettraient d’obtenir des aciers plus affinés et de composition régulière, il se lança dès 1840 dans la fabrication de l’acier par fusion en vase clos dans des creusets chauffés au coke (4). . Afin de contrôler son approvisionnement en combustibles , Jacob Holtzer installa des fours pour l’obtention du coke. Il n’était plus obligé de l’acheter à la Compagnie des mines de Firminy. L’esprit d’innovation trouva un autre champ d’application avec l’installation en 1844 du premier laminoir (5) actionné par une machine à vapeur capable aussi d’entraîner des martinets.
En 1852, afin de s’affranchir des servitudes d’approvisionnements en fer fin (qui venaient de Franche Comté et de Suède), Jacob Holtzer acheta la licence de Wolf et Langswiller qui lui permit de développer la technique du puddlage (6). Cette technique avait le double intérêt d’améliorer la qualité de l’acier produit avec un meilleur prix de revient. Aux quatre fours à puddler du début s’en ajoutèrent cinq autres avant 1861.
En réponse à la diversification des produits demandée par le marché, il acheta en 1857 à Bochum le brevet Meyer pour le moulage de l’acier : point de départ de la production annuelle d’une centaine de cloches en acier moulé, moins coûteuses qu’en bronze.
Pour ne plus dépendre des importations de fonte suédoise, Jacob Holtzer acquit progressivement les mines et hauts fourneaux de la Ria (Pyrénées orientales), appréciées pour la qualité de leur fonte.
En 1861, Jacob Holtzer légua sa succession à son fils Jules et à son gendre Frédéric Dorian. L’avènement de ces deux personnalités allaient conduire à de nouveaux développements entraînés par la réputation et l’afflux de commandes. Ainsi en 1867, un laboratoire de recherche fut établi dans l’usine elle-même, et confié au savant agronome et technicien J.B. Boussingault. Là s’inventèrent les aciers spéciaux (conséquence des observations antérieures du savant). Cette interaction du laboratoire et de l’usine permit aux établissements Holtzer de s’assurer des productions d’avant-garde.
 
D’après René Commère, Mémoires d’acier en Ondaine,
publications de l’université de Saint-Etienne, 2000.
 
 
document 2. Les usines Holtzer en 1870 -1890
 
 
 
source : plaquette du centenaire des établissements Holtzer, écomusée de Firminy
 
Document 3. L’essor des établissements Jacob Holtzer
 
années
Nombre d’employés
Superficie (m²)
Tonnage vendu
1849
80
 
700
1860
500
30 960
1 650
1880
 
55 400
5 131
1900
1500
113 900
6 137
1913
1700
125 000
 
1914-1918
6 000
 
 
 
D’après J. Jacquemond, La révolution industrielle dans la vallée de l’Ondaine (1815 – 1914),
publications de l’université de Saint-Etienne, 1995
 
 
Document 4. Témoignage d’un ancien ouvrier sur des conditions de travail avant 1939
 
La vie quotidienne :  « elle était simple ! » On commençait à 6 heures du matin , on aurait dû finir à 2 heures et demi mais tout le monde faisait des heures supplémentaires, on restait jusqu’à 4heures ½ (pourquoi ? Le patron payait peu, pour s’en tirer, il fallait en faire davantage). On faisait 48 heures, c’était la loi des 40 heures. C’était tout bénéfice pour le patron. Alors vous vous rendez compte de cette époque où les ouvriers travaillaient de 6 heures du soir à 6 heures du matin ou de 6 heures du matin à 6 heures du soir ; de jour, ils avaient ½ heure pour manger la soupe à 8 heures et demi, ils quittaient à 11 heures et avaient une heure et demi pour aller manger chez eux. Et le dimanche matin tout le monde allait travailler, de 6 heures à 10 heures ½ . L’après midi, ils étaient fatigués, ils faisaient un petit somme, ils allaient au jardin. C’était des vies sans perspectives.
 
Témoignage recueillis entre 1978 et 1981
dans le cadre d’une enquête pilotée par la Maison de la Culture de Firminy.
 
 
 
Document 5. L’école pratique d’industrie (aujourd’hui Lycée Jacob Holtzer)
 
La création à Firminy en 1901 de l’Ecole pratique d’industrie répondit à la nécessité de procurer à la métallurgie une main d’œuvre bien formée et d’élever la condition ouvrière par de meilleures qualifications. On avait besoin de jeunes gens initiés au traçage, au montage, au réglage des machines, à la conduite des chaudières et des fours, à la lecture des dessins, et capable ultérieurement de devenir des contremaîtres (7) ou des techniciens. Le financement était pris en charge pour les deux tiers par les aciéries d’Unieux et de Firminy. (René Commère, op.cit)
 
 

 
 carte postale non datée (début XX° siècle)
 
vocabulaire :
 
1. Faute de savoir fondre le métal à l’état liquide pour le rendre homogène, on pressait au martinet des barres rougies d’acier.
2. fabrication d’outils propres à tailler, à couper (faux, faucilles).
3. marteau-pilon
4. combustible obtenu par distillation de la houille. Sa combustion permet d’atteindre des températures élevés nécessaires à la fusion du métal.
5. machine permettant la transformation de la forme d’un métal par compression entre deux rouleaux tournant en sens inverse.
6. procédé métallurgique permettant d’obtenir du fer aussi pur par élimination du carbone contenu dans la fonte (la fonte est le produit obtenu par le traitement des minerais de fer par le charbon) . On obtenait un acier en très faible quantité de carbone donc très robuste
7. personne qui dirige les ouvriers dans une usine
 
 
 Correction
 
1. Présentez rapidement les établissements Holtzer à leur origine (fondateur, localisation, année de création, type de production) (doc. 1)
 
 
Les établissements Holtzer ont été créés par Jacob Holtzer à Unieux en 1832 après la fin de la collaboration avec son cousin. Ces établissements sont installés à Unieux (moulin du Vigneron). Il y produisait de l’acier corroyé ( faute de savoir fondre le métal à l’état liquide pour le rendre homogène, on pressait au martinet des barres rougies d’acier) .
 
2. Quelle était au départ la principale force motrice des martinets ? (doc. 1)
 
Les martinets sont au départ actionnés par des moulins hydrauliques dans la tradition métallurgique de la vallée de l’Ondaine
 
3. Comment évoluent ces établissements des origines à 1918 ? Quelle en est la conséquence paysagère ? A quoi donne naissance le développement de la métallurgie dans la vallée de l’Ondaine ? (doc. 1 à 3)
 
on assiste à une extension géographique : les établissements s’agrandissent ; les équipements industriels se multiplient et se diversifient (laminoirs, fours, martinets….) l’ensemble du site atteint plus de 125 000² à la veille du premier conflit mondial (soit 19 terrains de football). Progressivement, la machine à vapeur vient compléter puis de substituer à la force hydraulique : le recours au machinisme permet d’accroître la production. 
On voit apparaître dans le paysage l’usine (voir définition p. 16) avec ses cheminées, ses structures en acier, ses ateliers en brique rouge puis en béton, ses voies ferrées. à On assiste donc à une concentration de la main d’œuvre en un même lieu ( on compte ainsi jusqu’à 6 000 employés pendant la première guerre mondiale)  
Précision : les activités traditionnelles, les ateliers ne disparaissent pas : passage progressif de l’atelier (voir exposé sur la clouterie) à l’usine, sans pour autant qu’il ait une disparition brutale.
 
Jacob Holtzer tente aussi de contrôler son approvisionnement en matière première (fer) et source d’énergie (coke). Il s'agit donc d'un  phénomène de concentration verticale.(contrôle des activités d’une même filière de production) (schéma p. 15).
On assiste à la naissance d’un géant industriel
 
4. Comment est financée cette extension ? (doc. 1)
 
Cette extension est autofinancée : La forte hausse de la  demande permet à Jacob Holtzer d'effectuer d'importants bénéfices. Il les réinvestit dans son entreprise (au départ pas d’appel à des capitaux extérieurs ce n’est qu’au début du XX° siècle que l’entreprise devient une société anonyme afin de mobilier davantage de capitaux (ouverture du capital à des actionnaires qui peuvent exercer leur droit de vote en assemblée générale et élire les membres du conseil d’administration) . Ces capitaux permettent de financer la recherche (nouveaux laboratoires construits en 1931) et des investissements très coûteux (nouvelle presse, fours…)
 
5. Recherchez dans le manuel la définition d’innovation. Identifiez les innovations en matière de procédés métallurgiques ? Comment sont obtenues ces innovations ? Qu’est-ce qui pousse Jacob Holtzer et ses successeurs à vouloir toujours innover ? (doc. 1 et doc. 3)
 
définition p. 16 : introduction d’une invention dans la production
 
aciers produits : acier corroyé puis l’acier par fusion en vase clos dans des creusets chauffés au coke puis puddlage, puis acier moulé, puis aciers spéciaux
 
Ces innovations sont obtenues par achat de brevets puis par le développement de leurs propres laboratoires de recherche. (souci d’indépendance)
 
Tous ces progrès permettent :
 
  • d'augmenter la productivité : « produire plus, plus vite »
  • améliorer la qualité des produits
  • de diversifier les produits proposés (afin de saisir les opportunités du marché et s’assurer plus d’indépendance dans les débouchés) : Aciers pour outils, pièce d’armes, acier spéciaux pour pièces d’automobiles, d’avions, aciers corroyés pour coutelleries, taillanderies, carrosserie, pièces de forge brutes et pièces moulées pour sondage minier,
 
tout ceci dans un seul but : la recherche de la rentabilité
 
6. Quand est créée l’école pratique d’industrie ? Pourquoi les établissements Holtzer participent-ils à son financement ? Définissez ce qu’est un contremaître ? (doc. 5)
 
l’école est crée en 1901 et permet aux établissements Holtzer de recruter une main d’œuvre qualifiée : des cadres qui assurent le contrôle des machines (techniciens) et des contremaîtres pour assurer le contrôle de la main d’œuvre et de la production.
 
 
7. Quelles sont les conditions de travail des ouvriers ? (doc. 4)
 
Les ouvriers sont soumis à un rythme de travail imposé par l’usine (présence d’horaire) mais sont faiblement rémunérés.
 
8. Quel est l’objectif d’une telle organisation du travail ? (doc. 3)
 
La concentration de la main d’œuvre soumis à un contrôle de la part des contremaîtres permet d’augmenter les rendements : souci de rentabilité.
 
 
9. A partir du travail réalisé, complétez le tableau suivant. 
 
 
La clouterie (proto-industrie)
La métallurgie (industrie)
Direction de la production
Système des marchands fabricants
Grands capitaines d’industrie (dynastie industrielle)
Organisation du travail
Travail à domicile : travailleurs isolés en milieu rural et urbain
Usine (concentration de la main d’œuvre en ville)
Force motrice
Homme, animal, hydraulique
Hydraulique puis Machine à vapeur : mécanisation
Politique de formation
aucune
Création de l’école pratique
Place de l’innovation
aucune
Nombreux brevets et recherches
Moteur de la croissance industrielle
Accroissement de la production par extension
Accroissement de la production par extension et intensification (Standardisation et production de masse)
période
XIII ( ?) au milieu du XIX°
A partir du milieu du XIX°
 
 
10. A partir du travail réalisé et des doc. 1 p. 28 et 3 p. 39, dites en quoi le processus d’industrialisation est un moteur de la croissance
 
L’industrialisation est un moteur de la croissance  : la conjugaison de tous ces éléments (concentration de la main d’œuvre, recours au machinisme, innovations) permettent une production de masse. L’industrie représente une part essentielle dans la production des richesses nationales et aussi en terme d’emploi (voir doc. 1 p. 28 doc. 3 p. 39) Pendant le même temps l’accroissement de la demande constitue aussi une incitation à produire plus et plus vite
 
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A
Bonjour et merci pour ses instructives informations! Je suis le petit-fils de Jean Holtzer [1892-1976] issu de Jean, ce cousin de Jacob qui firent, un temps, forges communes; Mon grand-père Jean fut aquarelliste du dimanche [sinon cadre dirigeant aux Mines de la Sarre] et emmena, au sortir de la guerre [été 1946], sur son Solex, ma mère [sur son vélo] dans un petit tour d'Alsace qui les conduisit à Klingenthal où il réalisa deux aquarelles des Forges Holtzer alors peu ou prou délabrées [comme en témoignent ces deux peintures]; depuis lors, cette expédition artistique autant que cette remontée aux origines, sont devenues une antienne dans la saga familiale, au point que je m'apprête à la rééditer ce prochain été avec mon propre fils [tous les deux en vae, par contre]... Cordialement vôtre! [Si d'aventure cela devait vous intéresser, je serai ravi de vous adresser amicalement copie de ces très bonnes aquarelles-témoin du Temps qui passe].
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Lancé en 2006, ce blog pédagogique d'histoire-géographie et d'éducation morale et civique (E.M.C.) tire son nom d'un terme issu du parler gaga (le parler stéphanois) ; le cafuron (window in english !) est une lucarne ou un oeil de boeuf éclairant un réduit. Ce blog s'adresse tout autant aux élèves du lycée Jacob Holtzer (Firminy- Loire) qu'à un public plus large. Bonne visite !