Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Ce blog pédagogique d'histoire-géographie et d'éducation morale et civique (E.M.C.) tire son nom d'un terme issu du parler gaga (le parler stéphanois) ; le cafuron (window in english !) est une lucarne ou un oeil de boeuf éclairant un réduit. Ce blog s'adresse tout autant aux élèves du lycée Jacob Holtzer (Firminy- Loire) qu'à un public plus large. Bonne visite !

04 Dec

correction DS sur l'exposition coloniale de 1931 (1ière S2/4)

Publié par Louis BRUN  - Catégories :  #première

 Après avoir présenté ce document tout en le replaçant  avec précision dans son contexte historique, vous montrerez en quoi il  est révélateur du discours colonial de l’époque. Mettez enfin en évidence  les limites d’un tel document pour appréhender objectivement la réalité de la colonisation.

 

Document 1. Affiche pour l’exposition coloniale de Vincennes de 1931 (B. MILLERET)

plusgrandefrance.JPG

 Les chiffres indiqués sur la carte nous fournissent la superficie du territoire, le nombre d’habitants et le nombre de troupes.

 

 

Commentaires d'ensemble : le libellé distingue trois temps :

 

1. Une présentation du document (document source ou d’interprétation, nature, auteur, thème, intention destinataire  avec une forte contexualisation)

 

2. Une analyse du document devant mettre en évidence la nature du discours colonial

 

3. Une critique du document en soulignant l’occultation de  la réalité de la colonisation

 

Pistes de correction (La numérotation est ici uniquement à titre indicatif. Elle ne doit pas apparaître sur la copie). 

  

1. Ce document source est une affiche publicitaire réalisée par B. Milleret  pour le compte de  l’exposition coloniale organisée à Vincennes (banlieue parisienne)  entre mai et novembre 1931. Il s’agit d’inciter la population à venir assister à cette exposition pour découvrir l’empire colonial français et les bienfaits de la colonisation.  Organisée par les autorités françaises, l’exposition coloniale est consacrée à l’empire colonial français mais aussi à des puissances colonisatrices invitées (sauf le Royaume Uni, grand absent et qui a refusé de participer pour des raisons budgétaires). Des initiatives avaient déjà eu lieu avant guerre notamment lors de l’exposition universelle de Paris de 1889 où une cité exotique avait été édifiée sur le Champs de Mars.

Il convient de replacer cet évènement dans le contexte de l’après guerre. En effet, la Grande Guerre a renforcé les liens de solidarité entre la métropole et ses colonies : les colonisés ayant participé à l’effort de guerre aussi bien à l’avant qu’à l’arrière. La Guerre a donc changé le regard des Français sur leur empire pour lequel il n’avait manifesté jusqu’alors qu’un faible intérêt. La France est également confrontée à la crise économique (crise de1929) et cette période est marquée par un repli sur l’empire.

 

2. Cette affiche est un véritable document de propagande révélateur du discours officiel de l’époque sur la colonisation. Elle nous présente « la plus grande France ». En effet, ce planisphère centré sur la France met en évidence l’étendue  de l’empire colonial, élément de fierté nationale. Elle nomme les territoires et indiquent pour chacun d’eux leur superficie, leur poids démographique et le nombre de troupe présente sur place.  En effet, dans les années 30, l’empire colonial français est à son apogée : 12 millions de km² et plus de 60 millions d’habitants (100 millions d’habitants avec la métropole). Aux anciennes colonies comme la Martinique, la Guadeloupe, Guyane,  (Amérique) ou  la Réunion se sont ajoutés au XIX° siècle un important domaine africain (Algérie, Tunisie, Maroc, Madagascar et en Afrique Subsaharienne) ainsi que la péninsule indochinoise (Asie) et des territoires insulaires en Océanie. En 1922, la SDN confie à la France (sous forme de mandat : définition p. 214) d’anciennes possessions allemandes (Togo et Cameroun) et ottomanes (Liban et Syrie). Parmi tous ces territoires, un seul est une colonie de peuplement (colonie dans laquelle s’installe définitivement un grand nombre d’habitants venus d’Europe) : l’Algérie.

Des personnages sont également représentés sur cette carte  et soulignent ainsi la diversité de peuplement de l’empire : ils sont censés être les stéréotypes des populations colonisées : l’Africain du nord,  assis sur un tapis, portant une djellaba et fumant le narguilé. La nudité de l’homme noir est mise en évidence tandis que l’asiatique, portant un lourd fardeau semble être au travail. Ces distinctions permettent de souligner l’inégal degré d’avancement de civilisation des populations.  On peut constater que l’affiche veut aussi donner l’image d’un empire pacifié en opposant le poids démographique de ces territoires et la faiblesse des troupes présentes sur place. Ces peuples divers sont réunis autour du drapeau tricolore qui encercle la métropole.  Ce drapeau constitue le symbole du lien entre deux univers assez lointains : l'Empire et la France. Il doit convaincre les Français que ces peuples colonisés viennent renforcer la nation, et montre que la France affirme son autorité sur l'outre-mer.

Un texte accompagne la carte. Placé dans un cartouche en bas à droite, le spectateur peut lire : « c’est avec 76 900 hommes que la France assure la paix et  les bienfaits de sa civilisation à ses 60 millions d’indigènes ». Ce texte est à mettre en relation avec le traitement graphique de la France sur la carte. Le territoire métropolitain  est entouré du drapeau tricolore et diffuse une lumière (« Les Lumières ») en direction des colonies. Les autres territoires, restant dans une certaine obscurité.  En effet, l’affiche vante les vertus de la colonisation à la française et son œuvre civilisatrice (« bonne conscience ») : pacification (« paix ») (fin des guerres tribales, de l’esclavage), enseignement, progrès sanitaires, urbanisation….(« bienfaits de sa civilisation »)La France entend  mener  dans ces territoires une politique d’assimilation en imposant la culture républicaine française : il s’agit de faire, à terme,  des colonisés des citoyens français à part entière.  L’affiche adopte ainsi un ton paternaliste : la France, mère patrie protège et éduque « ses 60 millions d’Indigènes ». Elle met à la fois en évidence la supposée supériorité de l’homme blanc qui a un devoir moral envers ses populations considérées comme de grands enfants et qui n’ont pas encore atteint un stade de civilisation avancée.

Cette propagande permet  donc de justifier la colonisation ; c’est aussi une exaltation du sentiment patriotique : les Français doivent être fiers de leur empire !

 

3. Cette affiche  passe sous silence les effets négatifs de la domination coloniale. Dans la réalité,  les résultats de l’œuvre civilisatrice sont contrastés : les progrès médicaux (campagne de vaccination, création d’hôpitaux) sont réels mais l’œuvre sanitaire est surtout guidée par le souci de s’assurer une main d’œuvre en bonne santé. Sur le plan scolaire, les effectifs scolaires restent faibles même dans le primaire.

Sur le plan politique, les colonisés sont soumis au code de l’indigénat et ne participe à l’administration de leur territoire.

Les colonies sont exploitées  par et pour la métropole : elles sont au service de la métropole. Les cultures d’exportation (coton, caoutchouc, cacao, arachide…) et les matières premières (bois, minerais..) se développent au détriment des cultures vivrières. Ces produits sont ensuite envoyés en métropole pour  être transformés. Les colonies représentent donc une réserve de matières premières.  C’est aussi un marché préservé où l’on peut vendre une partie des produits transformés en métropole.

La mise en valeur de ces territoires (plus particulièrement les colonies d’exploitation : colonie exploitée pour fournir aux métropoles des matières dans laquelle le peuplement d’origine européenne est très faible) est assurée par une main d’ouvre locale, soumise parfois au travail forcé. L’obligation de payer un impôt personnel et la confiscation des terres dont les populations peuvent être  victimes les poussent à cherche un travail salarié dans les plantations ou les mines ou venir s’installer dans les premiers bidonvilles où ils constituent un sous-prolétariat urbain.

 

Conclusion :

L’exposition coloniale connait un grand succès : 8 Millions de visiteurs dont 1 millions d’étrangers.  Cela  témoigne aussi sans doute d’une propagande réussie sur le projet colonial. Jusque dans les années 1918, la colonisation a peu de soutien auprès de l’opinion publique. Mais grâce à une propagande acharnée en particulier par le biais de l’école, les Français adhèrent de plus en plus au projet colonial.

La contestation de l’ordre colonial reste limitée à quelques intellectuels en France proche du parti communiste ; on peut ajouter que dans les colonies, la contestation se développe. L’empire n’est pas totalement pacifié  tandis qu’une élite « indigène » commence à remettre en cause la domination coloniale :  Ho Chi Minh a fondé par exemple en 1930 le parti communiste indochinois.

 

 

 

 

 

Commenter cet article

Archives

À propos

Ce blog pédagogique d'histoire-géographie et d'éducation morale et civique (E.M.C.) tire son nom d'un terme issu du parler gaga (le parler stéphanois) ; le cafuron (window in english !) est une lucarne ou un oeil de boeuf éclairant un réduit. Ce blog s'adresse tout autant aux élèves du lycée Jacob Holtzer (Firminy- Loire) qu'à un public plus large. Bonne visite !